La mesure rétablissant le droit à la retraite à 60 ans pour certains assurés est présentée ce matin en Conseil des ministres. Le gouvernement va assouplir les conditions d’accès au dispositif des départs anticipés au titre des carrières longues.
C’est la première grande mesure sociale qui se concrétise depuis le 6 mai : le rétablissement, pour certains assurés, du droit à la retraite à 60 ans. Le gouvernement tenait à en dévoiler les contours avant les législatives. Le projet de décret, préparé par la ministre des Affaires sociales, Marisol Touraine, sera décrit en Conseil des ministres ce matin. Le symbole est fort. Avec la réforme de 2010, Nicolas Sarkozy avait mis fin à un acquis social de la gauche, la retraite à 60 ans, instaurée sous le premier septennat de François Mitterrand. En revenant partiellement sur cette réforme dès son investiture, François Hollande veut, lui aussi, marquer l’opinion, à quatre jours du premier tour des élections.
Le principe de cette « mesure de justice » est connu. Les assurés qui ont commencé à travailler jeunes (18 ou 19 ans) et qui ont suffisamment cotisé (41 annuités pour la génération née en 1952) pourront partir à 60 ans. Ils ne seront pas contraints d’attendre le nouvel âge légal, qui augmente progressivement avec la réforme Sarkozy. Il s’agit en fait d’un élargissement du dispositif instauré en 2003, qui prévoit des départs anticipés pour les « carrières longues ». La mesure coûtant nettement moins cher que les 5 milliards d’euros par an initialement prévus, le gouvernement est prêt à en assouplir les conditions d’accès. Il faut actuellement avoir cotisé 8 trimestres de plus que les 41 annuités, soit 43 ans. Selon nos informations, cette condition devrait être supprimée dans le décret. Il s’agit là d’une revendication de longue date de la CFDT.
Pas de remise en cause radicale
Les syndicats demandent aussi une meilleure prise en compte des trimestres de chômage et des congés maternité. Le gouvernement devrait annoncer ce matin s’il accède à ces demandes. Il est quasiment certain qu’un effort sera fait en faveur des femmes. Au total, le nouveau dispositif de départ anticipé concernerait environ 100.000 nouveaux retraités par an en moyenne, pour un coût compris entre 2 et 3 milliards d’euros à l’horizon 2017 – le chiffrage précis dépendra des contours exacts de la mesure. Le temps d’adapter les ordinateurs des caisses de retraite, celle-ci pourrait s’appliquer à la fin de l’année. Le financement, lui, entrerait en vigueur début 2013. Le gouvernement a prévu d’augmenter progressivement les cotisations retraite pour les salariés et les employeurs. C’est la première fois que les cotisations sont relevées depuis 2006.
Même si le symbole est fort et marque les esprits en Europe, il ne s’agit pas d’une remise en question radicale de la réforme Sarkozy. L’âge légal de la retraite, inscrit dans la loi, reste fixé à 62 ans pour les générations nées en 1955 et les suivantes. Dans un deuxième temps, François Hollande s’est engagé à lancer une négociation en vue d’une « réforme globale », qui devrait démarrer avant la fin de l’année. Sans attendre de connaître le décret dans le détail, l’UMP a tiré à boulets rouges hier. Eric Woerth, qui a porté la réforme Sarkozy lorsqu’il était ministre du Travail, a souligné que la hausse des cotisations « pèserait à la fois sur la compétitivité et le pouvoir d’achat ».